Redécouvrir le Sacré-Coeur

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Redécouvrir le Sacré-Cœur

L’image ci-contre du Sacré-Cœur de Jésus provient de l’autel latéral droit de Grolley. On le trouve aussi sur un vitrail du chœur. A Belfaux, la statue du Sacré-Cœur accueille le fidèle au bas de la nef latérale de droite. Les représentations du cœur du Christ ont connu leurs heures de gloire aux XIXe et XXe siècles. Elles possèdent un caractère singulier : le cœur humain du Christ ne se trouve pas à sa place, il n’est pas caché dans son corps, mais bien mis en évidence en dessus des habits. Erreur anatomique mais vérité théologique à redécouvrir !

Comme il a été signalé dans l’éditorial du feuillet dominical de cette semaine, la dévotion au cœur du Christ s’enracine dans l’Ecriture sainte. Les mystiques ont longuement médité sur la blessure au côté du Christ dont parle saint Jean. Vénérer le cœur du Christ, c’était comme entrer dans cette blessure pour en ressortir le symbole de l’amour divin.

On l’a dit, les expériences mystiques de sainte Marguerite-Marie Alacoque au couvent de Paray-le-Monial ont beaucoup fait pour dynamiser la dévotion au cœur du Christ. La représentation iconographique est allée dans deux directions. Ou bien on a placé le cœur divin dans un décor allégorique, ou bien on a représenté le portrait de Jésus avec son cœur posé sur la poitrine. Selon les orientations de Rome, c’est la deuxième image qui a prévalu, laissant la première à la dévotion privée. On évitait ainsi de bloquer une dévotion sur une partie du Christ. On la conduisait à sa personne totale. En vénérant un cœur, nous vénérons celui qui a donné sa vie pour nous, Jésus.

La dévotion au Sacré-Cœur a été combattue par un courant théologique, le jansénisme. Les jansénistes étaient adversaires du Sacré-Cœur. On dit que c’était par sectarisme, car ils insistaient sur le petit nombre des élus, et ne voulaient pas trop faire la promotion de l’amour de Dieu symbolisé par le Sacré-Cœur. Ils parlaient plutôt de la justice divine, de son courroux contre les pécheurs. Mais est-ce la bonne explication ?

Même si elle peut contenir une part de vérité, nous pensons que cette explication est réductrice. Les jansénistes, qui étaient des gens dignes et austères, étaient plutôt choqués par la représentation d’un organe du corps, fût-il de Jésus. A la limite, ils étaient choqués par l’insistance mise sur la chair, le sensible, le visible. Ils ne niaient pas l’amour de Dieu, ce serait injuste de le dire, mais ils voulaient une religion intériorisée, toute désincarnée. Le monde, la chair, étaient vus négativement par eux. Pour eux, la dévotion au cœur visible du Christ constituait un détournement de la véritable spiritualité.

Suivant en cela les décisions des autorités religieuses, la majorité du peuple catholique se détourna d’une telle interprétation et accepta avec enthousiasme de vénérer le cœur visible du Christ, tout en sachant bien qu’il signifiait l’amour de Jésus et non pas un organe séparé de sa personne. Notre époque ne s’enthousiasme pas autant pour cette dévotion. Elle juge les statues du Sacré-Cœur mièvres et figées. Il est vrai que ces objets trahissent souvent la fabrication en série. Mais on peut représenter de bien des manières Jésus et son cœur transpercé ! Cette dévotion en tout cas est d’actualité. Elle montre que la chair et le visible ne s’opposent pas à la spiritualité. Dieu est le créateur du monde et vers la fin des temps, il a pris chair de notre chair. Faudrait-il mépriser ce qu’il a fait et assumé ? La dévotion au cœur de chair du Sauveur nous répond qu’il ne devrait pas en être ainsi.