Le poisson

AccueilPatrimoineLe poisson

Le poisson, un ancien signe chrétien

Nous avons parlé du coq des clochers. Bien d’autres animaux ont une symbolique religieuse. Voici cette semaine le poisson, que l’on trouve sur le couvercle du baptistère de Grolley. Cela convient bien avec les lectures de ce dimanche parlant de mer et de tempête apaisée.


Le poisson est souvent cité dans le Nouveau Testament. Cette mention correspond à une réalité. Jésus commence son ministère en Galilée et fréquente les bords du lac de Tibériade. Plusieurs disciples sont d’anciens pêcheurs. Le poisson fait partie de l’alimentation de base de la région. Il apparaît dans les récits de la multiplication des pains.

Du point de vue symbolique, le poisson désigne les fidèles. Jésus fait un jeu de mots au moment de l’appel de Simon et André : « Venez à ma suite, et je ferai de vous des pêcheurs d’hommes » (Marc 1,17). Une parabole de Jésus indique que le Royaume de Dieu est comparable à un filet qui prend toutes sortes de poissons (Matthieu 13,47-50). Ce discours indique la coexistence des bons et des mauvais en ce bas monde, et le tri final. Le récit de la pêche miraculeuse (Jean 21,1-14) pourrait montrer au contraire la vocation de l’Eglise à accueillir toute l’humanité autour du Christ ressuscité.

Les deux poissons représentés sur le couvercle du baptistère de Grolley feraient donc allusion aux fidèles, aux chrétiens. Selon une interprétation ancienne, les croyants sont retirés par le Divin Pêcheur de la mer du monde et de tous ses dangers. Selon une autre interprétation, ils évoluent au contraire dans l’eau, signe de leur baptême.

L’attribution au Christ de la symbolique du poisson ne se trouve pas comme telle dans la Bible. Au fils du temps néanmoins, les croyants ont remarqué que les lettres du mot grec pour désigner le poisson (ichthus) étaient le commencement de divers titres se rapportant au Christ :

I = Ièsous (Jésus)

Ch = Christos (Christ)

Th = Theou (de Dieu)

U = Huios (le Fils)

S = Sôter (Sauveur)

Nous avons donc i.ch.th.u.s = Jésus-Christ, Fils de Dieu, Sauveur. Notons que le S final, avant de signifier le mot Sauveur, aurait pu être compris en un premier temps comme la dernière lettre de Huios (ichthus = Jésus-Christ, Fils de Dieu).

Les témoignages désignant cette abréviation sont attestés autour de l’an 200. A cette époque, le théologien Tertullien en est sans doute bien conscient car au début de son traité sur le baptême écrit en latin, il mentionne le Christ-Poisson selon le mot grec, signe d’un lien spécial entre ichthus et Jésus : « Nous, petits poissons, qui tenons notre nom de notre ichthus Jésus-Christ, nous naissons dans l'eau et ce n’est qu’en demeurant en elle que nous sommes sauvés. » Le chrétien est donc comme un petit poisson à l'image du Christ-Poisson.

La représentation iconographique du poisson a connu un large succès dans l’Antiquité. Elle a repris son importance aujourd’hui.

Signalons que la peinture d’autel de la chapelle de Chésopelloz comporte aussi un poisson, tenu par saint Ulrich, le patron du lieu. Elle fait référence à un épisode de la vie d’Ulrich ou Udalric évêque d’Augsbourg. Un jour, quelqu’un voulant le diffamer et montrer qu’il mangeait de la viande le vendredi, sortit de sa besace ce que l’évêque lui avait donné en ce jour de jeûne. Quelle ne fut pas sa stupéfaction de voir le morceau de viande offert par Ulrich changé en poisson ! On ne pouvait donc pas accuser saint Ulrich d’avoir enfreint la loi du jeûne.